Tondre sa pelouse : un geste si commun dès les premiers beaux jours et pourtant quand on y réfléchit, un peu absurde. On s’évertue à faire pousser un beau gazon bien vert et bien régulier et quand il grandit trop, on le coupe et il devient un déchet. On veut profiter de son jardin tranquillement dans une chaise longue, pourtant toutes les semaines on doit passer du temps à tondre : des heures parfois. Le tout est vendu à grand renfort de publicités par les marques de matériel de jardinage motorisé.
Les débuts dans notre jardin
Quand nous avons emménagé dans notre terrain de 3500m² avec de grandes zones enherbées, j’étais convaincu que j’aurais besoin d’un tracteur tondeuse pour tondre l’herbe partout où c’était nécessaire.
L’ancien propriétaire en avait un. Il tondait toutes les semaines l’ensemble de son terrain à 2 cm, y compris dans le petit sous bois du fond. Et il empilait les tontes au bord du ru qui borde le terrain. Il était fier de la régularité de sa tonte et insistait pour que les traces de roues de son tracteur se chevauchent parfaitement.
La première chose que nous avons faite en arrivant c’est arrêté de tondre et observé. Même si c’était en juillet, des plantes très variées ont commencé à pousser, notamment du trèfle blanc et du trèfle des prés. La pelouse désertique est devenue le paradis des abeilles. Cela nous a donné à réfléchir pour la suite : fallait il tondre comme il le faisait ou pas ?
La gestion différenciée
La gestion différenciée ou tonte différenciée consiste à pratiquer une tonte (ou une non-tonte) différente suivant les emplacements.
Dans notre jardin, cela donne les choses suivantes
Nous tondons régulièrement (à hauteur maximale : 7cm) :
- Les surfaces enherbées donnant sur la rue
- Les bordures avec les voisins
- Les allées et autres zones de passage
- Les allées autour des planches de culture
- Un endroit où nous souhaitons conserver des graminées courtes
- Les zones sous les fruitiers lorsque nous devons récolter
Et c’est tout.
En 2020 le reste à été laissé en friche. Voici ce que ça a donné.
Les avantages de la tonte différenciée
- Le fait de ne tondre qu’une partie des zones enherbées nous a fait gagner un temps considérable. Nous avons investi dans une tondeuse électrique sur batterie nettement moins puissante que celle qui aurait été nécessaire pour tout tondre à chaque fois.
- La quantité de tonte produite est suffisante pour pailler les planches ou composter, mais reste gérable.
- La prairie obtenue avait une fière allure au mois de juin.
- Les allées délimitées sont assez esthétiques et peuvent être déplacées au besoin.
- Nous avons vu se développer nombre de plantes qui ne poussaient pas auparavant : trèfle des prés, centaurée, bugle rampante, lamier pourpre, boutons d’or, pâquerettes, achillée millefeuilles, pissenlits, oseille et bien d’autres. Elles ont pu fleurir et nous espérons donc les voir s’étendre au fil des ans.
- Toute cette flore a attiré papillons, abeilles, syrphes et bourdons et abrité nombre d’autres insectes.
- Au bout d’un an, nous avons constaté l’apparition de petits arbustes, notamment autour de pruniers. Nous surveillons leur développement dans l’espoir qu’ils pourront remplacer un jour certains fruitiers vieillissants et en mauvais état.
La fauche plutôt que la tonte
Le fait de ne pas tondre du tout n’a toutefois pas que des avantages.
A partir de juillet / août les hautes herbes se couchent et jaunissent.
Les herbes hautes couchées font un abri idéal pour les campagnols qui peuvent creuser leurs tunnels sans qu’on les voie.
A l’avenir, nous allons donc faucher une partie des zones laissées en prairie en début d’été. Le but est d’éviter les problèmes ci-dessus et de nous fournir du foin pour pailler les planches de culture à l’arrivée des grosses chaleurs, sans avoir un faire venir des rouleaux de paille.
Pour la fauche, nous utiliserons la faucille japonaise, très efficace et surtout précise pour les petites surfaces.
Certaines zones autour des massifs resteront non coupées pour fournir un abri aux insectes tout l’hiver.
Effet sur la biodiversité
En permettant la montée en graine de certaines plantes qui n’auraient pas l’occasion de se reproduire autrement, la tonte différenciée à un impact important sur la biodiversité végétale.
Tontes espacées
En espaçant les tontes et en tondant à la hauteur maximale, nous avons fait réapparaître des plantes de hauteur moyenne :
- pâquerettes
- trèfle blanc
- bugle rampante
- pissenlit
- lamier pourpre
- petite oseille
- plantain lancéolé
Absence de tonte
Dans les zones non tondues et les bordures de planches, la biodiversité est encore plus importante, suivant les zones du jardin.
- croisette commune (apparue en 2e année)
- gaillet luisant (apparu en 2e année)
- centaurée
- achillée mille feuilles
- renoncules
- stellaire holostée
- cardamine des prés
- trèfle des prés
- bouton d’or
- scabieuse
Il faut donc bien se rendre compte que les graminées : ray-grass et fétuque ne sont dominantes que grâce à la tonte.
Conclusion
Moins de sueur, d’énergie dépensée, plus de biodiversité : la tonte différenciée est pour nous la bonne solution. Essayez la donc cette saison !
Chouette retour d’expérience (et jolies photos !). La tondeuse électrique est-elle assez puissance pour les touffes de graminées coriaces ? Notre terrain est géré à peu près de la même façon, pour l’instant je reste avec notre petite tondeuse électrique (à fil) et niveau puissance des fois on sent que c’est un peu faible sur certaines graminées. Et le fil est galère sur un terrain d’une surface similaire au tien. Je penche donc opter pour une thermique.
Merci pour ton commentaire. Je vais ajouter d’autres photos de cette année quand ça aura encore poussé et fleuri !
La tondeuse électrique sur batterie Greenworks augmente sa puissance quand elle tombe sur une zone plus dense (elle tourne plus vite). Des fois ça ne suffit pas, surtout pour les herbes épaisses ou quand c’est vraiment trop haut. Pour ces dernières, j’ai laissé tomber le rotofil qui déchiquette tout pour passer à la faucille japonaise (http://www.jardin-qui-se-mange.fr/outillage/outils-jardin-japonais/). C’est un vrai rasoir qui arrive même à couper des ronces et de petits ligneux. Le but étant de faucher certaines zones seulement en début d’été, quand les herbes seront encore droites.
Salut, quel plaisir de voir que nous sommes de plus en plus nombreux à avoir une approche différente du jardin, du paysage… d’autant plus qu’on se rend compte qu’au final, on y gagne (en temps, en achat/entretien de machine, en produit issu d’énergie fossile, en santé physique ET mentale, et un gros plus, en biodiversité!)
J’expérimente la tonte différenciée aussi depuis 2 ans, notamment avec la découverte d’orchidées dans le nouveau jardin (qui autrefois était toujours tondu…), il y a en quasiment une centaine sur 20m²…!!
Comme toi, les graminées qui ont séchés deviennent un « faux-problème » : j’en enlève une partie autour de végétaux spontanés remarquables qui permet de garder un côté « relief » tout en apportant une touche de « jardin entretenu ». Au fond, c’est ca le jardin en mouvement… il évolue, nous on intervient, mais de manière raisonnée!
Bon été!
Oui, la tonte différenciée est un vrai outil pour booster la biodiversité. C’est vraiment dommage que ce ne soit pas plus répandu chez les particuliers alors que les espaces publics s’y mettent pour des raisons économiques.
Je renouvelle le bémol sur certains hôtes du jardin : on a fauché toute une zone autour d’arbustes fraîchement plantés après avoir découvert des galeries de campagnols qui arrivent jusqu’au niveau des racines. Mais avec les chaleurs qui arrivent, la fauche nous a fourni un mulch bienvenu. Et la tonte des allées et zones fréquentées est largement suffisante pour apporter tout l’azote voulu à notre compost.
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Bonjour, merci pour ses retours d’expérience!
Sur les zones non entretenues gérez vous tout de même les ronces et autres?
Merci